Intriguée par son titre, charmée par sa couverture, appâtée par une critique élogieuse dans quelque féminin anglais ou américain, j'ai commandé "When God was a Rabbit" en aveugle. Et je l'ai savouré à petites doses, pas plus de 40 pages à la fois pour le faire durer au maximum malgré mon envie de découvrir la suite.
Au fil de ma lecture, j'ai été frappée par les similitudes entre ce roman et "The particular sadness of lemon cake" terminé peu de temps auparavant. Ici aussi, Elly, la narratrice, est une fillette que l'on va suivre jusqu'à l'âge adulte; ici aussi, l'un des éléments-clés de l'histoire est son lien particulier avec son frère aîné; ici aussi, l'héroïne et son père ont chacun un secret qui remontera tardivement à la surface; ici aussi, des éléments subtilement fantastiques contribuent à créer une atmosphère singulière. Mais ce n'est pas tout: les deux auteurs ont un style également poétique - simple et concis pour Aimee Bender, plus ample et presque élégiaque pour Sarah Winman.
Pour autant, "When God was a rabbit" reste un roman tout à fait original qui sait tisser sa toile afin de captiver le lecteur. Un personnage y est pour beaucoup: Jenny Penny, l'amie d'enfance de l'héroïne, fillette excentrique élevée dans un foyer brisé qui deviendra une fugitive, puis une criminelle emprisonnée sans jamais perdre la grâce étrange qui l'anime. J'ai aussi beaucoup aimé le cadre enchanteur, proche de la nature et un peu hors du temps, offert par la nouvelle maison en Cornouailles où la famille d'Elly va s'installer après avoir gagné au Loto.
Le livre est divisé en deux parties. La première se déroule quand Elly a entre 8 et 12 ans, et qu'elle est encore une fillette gaie et curieuse de tout; la seconde reprend son histoire alors qu'elle est devenue une adulte morose, sans passion et sans but, au moment où les événements et les acteurs les plus marquants de son enfance vont refaire surface dans sa vie et où la boucle va se trouver bouclée. Une longue litanie de catastrophes ponctue son histoire et celle de ses proches: abus sexuels, violences domestiques, suicide, enlèvement et séquestration, cancer, meurtre, terrorisme, amnésie... Pourtant, bien qu'abîmés, les personnages qui survivent finissent par se remettre de tout, et malgré un côté doux-amer, la conclusion de "When God was a rabbit" est en définitive optimiste.
Ce premier roman de Sarah Winman dénote un talent très prometteur. Il comporte aussi certaines faiblesses: par exemple, j'ai eu du mal à éprouver vraiment la force du lien censé unir Elly à Joe, son frère aîné. J'ai aussi été un peu agacée de voir les attentats du 11 septembre utilisés une fois de plus comme ressort narratif tragique. (Un jour, je m'amuserai à dresser une liste des romans que j'ai lus dans lesquels, vers la fin, un proche du héros ou de l'héroïne meurt dans l'effondrement du World Trade Center; je vous garantis qu'elle sera longue). Mais en dépit de cela, j'ai beaucoup, beaucoup aimé "When God was a rabbit". Si vous êtes anglophone et que vous cherchez un roman captivant qui sorte un peu de l'ordinaire, je vous le recommande chaudement.
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