vendredi 17 juin 2011

"Undead and unwed"



Toujours à la recherche d'une série drôle et pas trop débile pour combler le vide laissé par les aventures de Stephanie Plum et celles d'Izzy Spellman, j'ai jeté mon dévolu sur une nouvelle héroïne. Elizabeth Taylor, dite Betsy, a trente ans. Elle est secrétaire et vit seule avec son chat. Alors qu'elle vient juste de se faire licencier, Betsy est tuée dans un accident de voiture. Elle revient à elle dans son cercueil et, ne comprenant pas pourquoi elle n'est pas restée morte, tente par tous les moyens de remédier à cette erreur de la nature. Ses vaillants efforts pour se supprimer demeurent vains: apparemment, Betsy est devenue hyper-balèze et quasi-indestructible. Elle exerce en outre une étrange attirance sur tous les mâles qui l'approchent. Ne comprenant pas encore ce qui lui arrive, elle rentre chez elle et découvre que sa vilaine marâtre a profité de son décès pour s'emparer de sa collection de chaussures griffées...

Pour faire court, Betsy est désormais une vampire - mieux encore: la reine des vampires, dont la venue a été annoncée par une prophétie millénaire! Ce qui ne l'arrange pas du tout, car elle voudrait juste continuer à mener une non-vie normale. Malheureusement pour elle, deux factions rivales tentent de la rallier à leur cause. La première est dirigée par un aspirant Bela Lugosi mal sapé, la seconde par une sorte d'Elvis au regard de braise.

A partir de là, l'histoire est assez prévisible. Comme dans la plupart des séries de bit-lit (ou est-ce juste dans AB?), la prude héroïne va rapidement devenir une chaudasse doublée d'une tombeuse. Du moins le fera-t-elle en Manolo Blahnik plutôt qu'en Nike. "Undead and Unwed" ne fait clairement pas mal à la tête, mais Betsy et ses deux sidekicks humains, Jessica et Marc, sont plutôt attachants; le style de MaryJanice Davidson ne manque ni d'humour ni de vivacité, et il n'y a guère de temps morts dans la narration. J'ai aimé l'équilibre entre le pitch fantaisiste, très second degré - pas si éloigné de "une lycéenne blonde écervelée est Elue par des puissances supérieures pour combattre le Mal" - et une réalité parfois cruelle, pleine d'enfants molestés et de dépressifs suicidaires. J'ai descendu d'une traite les 250 pages de ce sympathique petit roman. La bonne nouvelle, c'est qu'il en existe sept autres en anglais, et que les quatre premiers tomes de la série sont déjà traduits en français (avec des couvertures bien plus chouettes que celles de la VO).

jeudi 16 juin 2011

"Je veux être femme au foyer"



Non, je ne suis pas dégoûtée des scènes d'empalement et de partouzes au point de vouloir abandonner mon métier. Il se trouve juste que la pin-up de la couverture a attiré mon attention lors d'un récent passage chez Cook & Book, et qu'un rapide coup d'oeil à l'intérieur m'a convaincu que je passerais un bon moment avec ce livre de la Canadienne Rosemary Counter.

Dès l'introduction, le ton est donné: il sera vif et impertinent, voire politiquement incorrect. "Avocate dans un grand cabinet ou serveuse dans un bar, toute femme a son moment de lucidité. Fatiguée, débraillée, elle finit par se demander: qu'est-ce qui est plus amusant que d'aller au boulot? Ne pas aller au boulot. Mais à quoi pourrait-elle passer toutes ses journées? A faire tout ce qui lui plaît. Et les revendications du MLF? Et bien, elle a maintenant tout le temps de lire "le deuxième sexe" dans sa baignoire. Et qu'y a-t-il de plus girl power que d'envoyer un homme faire le boulot à sa place? Rien. Je ne dis pas que vous n'apportez pas votre contribution. En fait, votre simple présence est votre contribution. Certes, vous ne savez pas cuisiner, mais Dieu que vous êtes mignonne en tablier. Le ménage vous dégoûte, bien sûr, mais vous avez le numéro d'une adorable vieille dame originaire de Lisbonne qui ne demande qu'à le faire. Vous avez parfois du mal à tenir quelques Martini (le plus souvent, d'ailleurs, ce sont eux qui vous tiennent...) mais vous savez organiser des soirées géniales."

La suite est du même tonneau. Exemple, la recette des "Crêpes-je-suis-désolée-Chéri", pour quand la femme au foyer a quelque chose à se faire pardonner. Ingrédients: De la farine, 1 oeuf sans la coquille, 1 tasse de lait frais de préférence (si vous n'en avez pas, allez frapper à la porte de votre voisin sexy d'une manière suggestive). Préparation: Mélangez le tout dans un saladier. Versez la pâte dans une poêle chaude beurrée. Quand ça sent le cramé, retournez la crêpe. Quand ça sent à nouveau le cramé, c'est prêt." Ou encore, les 10 commandements de la grasse matinée: "1. Tu ne te réveilleras pas aux aurores. C'est à la fois totalement inacceptable et contraire à la marche naturelle des choses. Ca crée aussi un mauvais précédent." On atteint des sommets de drôlerie dans les quizz (mention spéciale à "Quelle est la profession de votre homme?") et les tableaux censés expliquer l'utilité des ustensiles de cuisine ou appareils électro-ménagers. De plus, la mise en page à base d'illustrations style 50's est totalement craquante. Un chouette cadeau à faire ou à se faire.

jeudi 9 juin 2011

"Narcogenèse"



Chaque fois que je pars en salon ou en convention, je reviens avec une brassée de bouquins écrits par des potes. Je ne les lis pas toujours. Ou, si je les lis et qu'ils ne me plaisent pas, je m'abstiens d'en parler. Mais à peine "Narcogenèse" refermé, je suis heureuse de pouvoir dire ici tout le bien que j'ai pensé du troisième roman publié par Anne Fakhouri chez l'Atalante.

C'est l'histoire d'une famille qui, depuis des générations, règne sur le domaine du Chais. Une famille riche et jalousée, qui se tient à l'écart du commun des mortels. Une famille dont toutes les filles sont un peu sorcières, et dont tous les garçons connaissent une fin tragique avant l'âge adulte. Une famille qui n'a pas conscience de ses propres secrets, et qui risque bien d'être rattrapée par eux. Tout commence lorsque plusieurs habitants de la région, frappés par des crises de somnambulisme, deviennent agressifs et dangereux après la tombée de la nuit. Peu de temps après, un orphelin disparu est retrouvé dans l'enceinte du Chais, violenté et à demi mort de froid...

Dans une ambiance oppressante comme celle d'un roman de Stephen King, Anne Fakhouri conjure les plus horribles des tabous liés à l'enfance. Ses chapitres courts sont autant de briques dont on peine d'abord à discerner de quelle manière elles s'emboîtent, mais qui entraînent implacablement le lecteur vers le royaume cauchemardesque du Marchand de Sable - lequel ne se montre guère plus tendre avec ses jeunes proies que l'abominable clown de "Ca". Je n'ose en dire davantage de peur de dévoiler les clés d'une intrigue remarquablement bien construite, à cheval entre la réalité et le monde onirique. Mais si vous aimez vous faire peur et que vous n'êtes pas sujet(te) aux insomnies, plongez-vous sans tarder dans "Narcogenèse".

Message personnel: Anne, tant qu'à reprendre l'allégorie du Magicien d'Oz, tu aurais au moins pu filer une paire de chaussures rouges à Zette!