lundi 27 juin 2016

"Anne of Green Gables" (L.M. Montgomery)


Début du XXème siècle, dans la petite bourgade d'Avonlea au Canada. Frère et soeur, Matthew et Marilla Cuthbert ne se sont jamais mariés et vivent ensemble à la ferme des pignons verts. Mais ils commencent à se faire vieux et auraient bien besoin d'un peu d'aide. Alors, ils demandent à adopter un jeune orphelin. Et au lieu du garçon attendu, c'est une fillette de onze ans qui arrive: Anne Shirley, rousse maigrichonne volubile et ultra-émotive. Le timide Matthew tombe immédiatement sous son charme, et même la sévère Marilla accepte rapidement de la garder chez eux...

La dernière fois que j'ai tenté de lire un grand classique de la littérature jeunesse anglo-saxonne, c'était la série des Narnia, et je me suis monumentalement ennuyée. Mais j'avoue que je n'ai pas su résister à la ravissante édition Puffin in Bloom de Penguin, illustrée par Anna Bond qui sévit également sur la ligne de papeterie Rifle Paper Co. Et dès la première page, je me suis laissée happer par la belle écriture de L. M. Montgomery, ses descriptions enchanteresses de la nature sur l'île du Prince Edouard, l'ironie très fine et non dénuée de tendresse dont elle fait preuve vis-à-vis de ses personnages. Bien sûr, certaines de ses remarques peuvent légèrement choquer aujourd'hui: Marilla Cuthbert ne veut pas adopter "un petit arabe de Londres", Anne préfèrerait avoir la beauté plutôt que l'intelligence parce qu'elle est "très féminine", et elle trouve qu'être grosse serait pire que tout. Hum. 

Ceci mis à part, c'est une des héroïnes les plus attachantes que je connaisse, chantre de la pensée positive longtemps avant que celle-ci ne soit mise à la mode par les gourous du développement personnel. Bien que portée sur les réactions dramatiques lorsque son enthousiasme l'a poussée à commettre une énième bêtise, ou quand sa gardienne lui refuse la permission d'aller s'amuser, Anne fait généralement preuve d'un optimisme à tout crin et d'un émerveillement perpétuel devant les beautés de la campagne où elle vit. Etourdie et rêveuse, elle considère que son imagination débordante est son plus gros atout. Dans l'adversité, elle retrousse ses manches et tente de faire pour le mieux. Sa spontanéité rayonnante et ses monologues-fleuve transforment en bien la vie des gens qui l'entourent et insufflent au lecteur une irrésistible bonne humeur. 

"What a splendid day! said Anne, drawing a long breath. Isn't it good just to be alive on a day like this? I pity the people who aren't born yet for missing it. They may have good days, of course, but they can never have this one." 

"- Wouldn't you just love to be rich, girls? 
- We are rich, Anne said staunchly. Why, we have sixteen years to our credit, and we're happy as queens, and we've all got imaginations, more or less. Look at that sea, girls - all silver and shallow and vision of things not seen. We couldn't enjoy its loveliness any more of we had millions of dollars and ropes of diamonds." 

"I shall give life here my best, and I believe it will give its best to me in return. When I left Queen's, my future seemed to stretch out before me like a straight road. I thought I could see along it for many a milestone. Now there is a bend in it. I don't know what lies around the bend, but I'm going to believe that the best does. It has a fascination of its own, that bend, Marilla. I wonder how the road beyond it goes - what there is of green glory and soft, checkered light and shadows - what new landscapes - what new beauties - what curves and hills and valleys farther on."

Ce roman, qui s'arrête alors qu'Anne a 16 ans, a été suivi de six autres qui montrent son évolution jusqu'à la cinquantaine. Traduit en français (et dans bien d'autres langues), il a également été adapté au cinéma et à la télé. 

dimanche 26 juin 2016

"La drôle de vie de Zelda Zonk" (Laurence Peyrin)


Les jours s'écoulent, un peu trop calmes, un peu trop sages, pour Hanna Reagan, lorsqu'un grave accident de voiture la cloue sur un lit d'hôpital. La campagne irlandaise a ses charmes, ainsi que son romancier de mari, mais rien de pétillant comme sa voisine de chambre, une vieille dame malicieuse et mystérieuse répondant au nom de Zelda Zonk. A ses côtés, et n'ayant rien d'autre à faire pendant sa convalescence, Hanna se prend à rêver d'une nouvelle vie, plus éclatante. Est-elle vraiment épanouie dans son hameau perdu, dans son mariage routinier? Alors que Zelda lui conte son existence positive et joyeuse, Hanna se demande s'il est encore possible de changer la sienne... 

J'ai un peu hésité à acheter ce roman couronné du Prix Maison de la Presse. Grosse snob littéraire que je suis, j'ai tendance à trouver consternants les bouquins qui cartonnent en termes de ventes (celui-ci, que j'ai détesté, ou celui-là qui m'est tombé des mains au bout de 70 pages, par exemple). Mais les gens qui cherchent à se réinventer, c'est un thème qui me parle, et au prix des poches, je ne prenais pas trop de risques.

L'excellente surprise que j'ai eu en commençant "La drôle de vie de Zelda Zonk", c'est que Laurence Peyrin écrit drôlement bien. J'ai aimé l'arrangement de vie peu conventionnel d'Hanna et son mari Jeff: ne pouvant avoir d'enfants, ils élèvent Patti, la nièce d'Hanna dont la mère hôtesse de l'air est trop occupée à parcourir le monde. Et j'ai adoré le mystère qui plane autour de Zelda Zonk: est-elle ou n'est-elle pas Marilyn Monroe ayant feint sa propre mort pour repartir à zéro loin du feu des projecteurs?

En revanche, je n'ai pas du tout apprécié que les velléités de changement de vie d'Hanna se traduisent par une liaison extra-conjugale archi-convenue et prévisible. Les histoires d'amour, ça me gonfle. Lorsque je lis: "Les yeux de Michael l'assassinèrent de leur éclat d'airain, sa mâchoire ombrée se contracta, sa main chaude serra son bras. Elle crut mourir, à le voir de si près (...). Il était beau à faire mal.", j'ai juste envie de pousser un gigantesque soupir. Un, parce que s'il y a une chose au monde que le fait de la mettre en mots affadit au lieu de la sublimer, c'est bien la passion amoureuse. Deux, parce que l'idée qu'une femme qui a besoin de se trouver aille le faire dans les bras d'un homme, je trouve ça confondant de manque d'imagination.

Ainsi, l'excellente impression que j'ai eue pendant les trois premiers quarts du bouquin a été gâchée par l'escapade parisienne d'Hanna qui m'a donné un sentiment de mille fois lu et relu. Et je passe sur la fin peu satisfaisante, apparemment conçue pour frustrer le lecteur en ménageant la possibilité d'une suite. Dommage, ça aurait pu être vraiment bien.

vendredi 24 juin 2016

"Chronologie: une histoire du monde" (Peter Goes)




Parmi les ouvrages qui me font systématiquement craquer, il y a les beaux livres dont le graphisme léché sert à représenter le monde sous forme de cartes, de plans ou autre schémas explicatifs. "Chronologie: une histoire du monde" de Peter Goes est le petit dernier de ma collection. Repéré en anglais à la boutique de la National Gallery of Scotland, il doit sortir en français au mois d'octobre et ferait probablement un magnifique cadeau de Noël pour une personne jeune ou moins jeune partageant mes goûts en la matière. Jugez-en vous-mêmes avec ces quelques planches:







jeudi 23 juin 2016

"The memory book" (Lara Avery)


"A une autre époque, future Sam, tu avais quatorze ans et tu étais immensément impopulaire (ce qui est toujours vrai). Tu ne te sentais pas à ta place à l'école. Tes parents refusaient de t'acheter des fringues cool, tu te faisais toujours sortir la première à la balle au prisonnier (...), et tu passais pour une véritable encyclopédie humaine en matière de bestiaire mythologique et de machines spatiales scientifiquement improbables. Pour dire les choses simplement: tu t'intéressais davantage au destin de la Terre du Milieu qu'à celui de ta planète." 

Quatre ans se sont écoulés depuis, et les choses ont bien changé. Sam s'est découvert une passion pour l'économie et la politique; elle a intégré le club de débat et enchaîné les victoires en concours. A la fin de sa dernière année de lycée, elle a une idée très précise de ce que sera sa vie. Pour commencer, elle va remporter le championnat national avec sa partenaire Maddie, réciter un beau discours à la cérémonie de remise des diplômes et partir étudier à l'université de New York. C'est alors qu'on lui diagnostique une affection très rare, la maladie de Niemann-Pick de type C, forme de démence précoce qui devrait peu à peu la priver de tous ses souvenirs. Mais Sam refuse de se laisser abattre. Alors, elle entame la rédaction d'un journal adressé à son alter ego du futur.

Comment rester soi-même et continuer à profiter de la vie quand une force implacable vous détruit de l'intérieur, anéantissant vos rêves et vos espoirs? Telle est la question à laquelle Sam se retrouve confrontée bien trop tôt. Alors qu'elle devrait se focaliser sur ses études et sur le début de sa vie amoureuse, l'avenir qu'elle tenait pour acquis lui file inexorablement entre les doigts. Mais la jeune fille lutte de toutes ses forces et relate son quotidien en lente désintégration avec beaucoup d'humour et peu d'auto-apitoiement. C'est d'ailleurs le gros défaut du livre: pas la moindre monologue sur l'injustice de sa situation, pas la plus petite colère contre le sort peu enviable qui lui échoit, aucune phase de découragement ou presque... J'ai parfois trouvé que son attitude manquait de nuance et de crédibilité. Et la fin survient beaucoup trop rapidement à mon goût. Néanmoins, "The Memory Book" est une oeuvre jeunesse touchante, à la fois roman initiatique, romance adolescente et réflexion sur la meilleure manière de vivre sa vie. (Et malgré ce que son titre pourrait laisser croire, il s'agit bien de l'édition française.)

lundi 20 juin 2016

"Les petites consolations" (Eddie Joyce)


Descendant d'immigrés italiens du côté de son père et irlandais du côté de sa mère, Bobby Amendola, pompier, a perdu la vie dans les attentats du 11 septembre 2011. Il laissait derrière lui des parents dont il était le chouchou, deux frères aînés aux caractères très différents et une épouse enceinte de leur second enfant. Dix ans plus tard, sa femme Tina annonce qu'elle a retrouvé l'amour et souhaite présenter son nouveau compagnon aux Amendola à l'occasion de l'anniversaire de leur fils, Bobby Jr. Gail, la matriarche, ne le vit pas bien du tout et tente de préparer les autres membres du clan à cette rencontre...

Durant une semaine, nous suivons chacun des Amendola tandis qu'ils évoquent leurs souvenirs et procèdent à un état des lieux de leur vie présente, souvent très influencée par le décès de Bobby. Tina, la seule et unique petite amie que Bobby ait jamais eue, culpabilise à l'idée de refaire sa vie malgré le temps écoulé. Peter le fils aîné, brillant avocat dans un cabinet de Manhattan, se débat contre les conséquences catastrophiques de sa liaison avec une jeune collègue. Franky le cadet est devenu une épave rongée par l'alcool, qui passe ses journées à boire et à faire des paris sportifs. Michael le père rumine ses regrets: sa vie aurait-elle été différente s'il avait repris la boucherie familiale au lieu de se rebeller contre son destin tout tracé? Hantée par le souvenir du défunt, Gail repense aux erreurs commises dans l'éducation de ses enfants, aux difficultés qu'elle a surmontées dans son couple.

De la même façon que chacun d'eux gère différemment son deuil, chacun d'eux a un rapport très personnel à ses origines. Pour Gail et Michael, enfants d'immigrés de la première génération, cela se caractérise par une opposition têtue à l'exemple donné par leurs parents. Pour leurs fils, c'est soit un attachement très marqué à Staten Island où ils ont grandi, soit un rejet viscéral de ce que les autres New-Yorkais considèrent comme un quartier de bouseux. Eddie Joyce met à nu les rouages internes de chaque membre de la famille Amendola, sans excuser leurs travers mais sans les juger non plus. Il en résulte un roman qui se dévore d'un trait, et dont la fin émotionnellement brillante m'a mis les larmes aux yeux.

"Il sait que c'est une mauvaise idée, se tourmenter l'esprit en imaginant les routes que sa vie aurait pu suivre. Il sait aussi qu'Internet n'est qu'un reflet lisse et schématique, caricatural, de la vérité humaine, qu'à cause de l'épreuve qu'il traverse ses propres illusions déposent un vernis idéalisé sur les parcours alternatifs." 

dimanche 19 juin 2016

Concours "Les racines du sacrifice": la gagnante!


Très peu de participations cette fois, sans doute parce que je n'étais pas disponible pour faire la promo du concours, ou peut-être parce que mes lectrices ne sont guère amatrices de thrillers!

Quoi qu'il en soit, c'est Sophie, l'auteur du commentaire n°4, qui remporte l'exemplaire de "Les racines du sacrifice" mis en jeu; je l'invite à m'envoyer son adresse postale par mail à: leroseetlenoir@hotmail.com

A bientôt pour d'autres concours!

samedi 18 juin 2016

"Les ferrailleurs T2: Le faubourg" (Edward Carey)


Après la destruction du château à la fin du premier tome de la série, Clod, changé en demi-souverain, se retrouve à Filingsham dans la poche de son ex-bonde James Henri Hayward bien décidé à retrouver sa famille, tandis que Lucy devenue un bouton d'argile échoue au fin fond de la décharge où elle est ramassée une fort étrange créature... Nos deux héros parviendront-ils à reprendre forme humaine et à se rejoindre dans un faubourg à son tour menacé? 

Le problème de beaucoup de séries à l'univers formidablement original, c'est qu'elles peinent à enchaîner après un premier tome prometteur. J'ai été plus que ravie de constater que tel n'était pas le cas avec "Les ferrailleurs". Au contraire: j'irais jusqu'à dire que "Le faubourg" est encore meilleur que "Le château". Outre un nouveau décor différent mais tout aussi lugubre, on y explore le fonctionnement et la source de l'intrigante relation humain-objet, et on y fomente une révolte sociale qui malgré son contexte imaginaire évoque très fortement certains troubles actuels. Les personnages secondaires se diversifient et deviennent encore plus fascinants, tandis que Clod et Lucy prennent davantage d'épaisseur au fur et à mesure que les événements les contraignent à endosser le rôle de héros-malgré-eux. C'est noir mais passionnant, et il paraît que le tome 3 (déjà disponible en anglais) conclut la trilogie en apothéose. Ce sera sans aucun doute une de mes lectures de l'été. 

vendredi 17 juin 2016

"The mystery of the clockwork sparrow" (Katherine Woodfine)


Son père militaire étant mort durant la guerre des Boers, Sophie Taylor, 14 ans, se retrouve à la rue et obligée de chercher un emploi pour subsister à ses besoins. Elle a la chance de décrocher un poste de vendeuse chez Sinclair's, fabuleux grand magasin qui doit ouvrir ses portes prochainement. Là, elle se fait rapidement des ennemies parmi ses collègues, mais aussi des amis en la personne de Lilian Rose, mannequin et apprentie comédienne, et Billy le jeune porteur maladroit. Mais la veille de l'ouverture, un vol est commis chez Sinclair's, et à cause d'un malheureux concours de circonstances, c'est sur Sophie que se portent les soupçons de la police et de ses employeurs. Pour laver son nom et conserver son travail, la jeune fille n'a d'autre choix que de se mettre elle-même à la recherche du coupable...

D'un côté, il y a une belle écriture qui donne merveilleusement corps à l'atmosphère de Londres à la fin du XIXème siècle et qui transporte instantanément le lecteur dans les coulisses de Sinclair's, grand magasin au raffinement inouï que toute accro du shopping rêverait de visiter. De l'autre, il y a malheureusement une intrigue cousue de fil blanc et d'invraisemblances grossières, qui ne nous épargne aucun des poncifs du genre tels que définis par "Le club des 5" ou "Alice détective". Planter un si beau décor pour faire s'y dérouler une histoire si ridicule, c'est un véritable gâchis. "The Mystery of the Clockwork Sparrow" pourrait sans doute plaire à des pré-ados n'ayant pas encore lu beaucoup de policiers jeunesse, mais c'est à peu près tout. 

lundi 13 juin 2016

Concours: "Les racines du sacrifice" (C.J. Lyons)


Elle cherchait l'aventure: elle a trouvé la peur et la trahison. Entraînée au plus profond de la jungle du Guatemala, Maria Alvarado, jeune étudiante en archéologie, n'a aucune chance de survie. A moins que Caitlyn Tierney, agent du FBI, ne retrouve sa trace et ne la ramène à son père, un leader de la biotechnologie aux poches profondes prêt à tout pour retrouver sa fille chérie. Seule piste, fragile: un étranger aperçu aux abords de son bateau de croisière, et qui pourrait l'avoir convaincue de l'accompagner. Caitlyn suit son instinct et pénètre dans les ténèbres. Mais les crimes qui s'y dissimulent n'ont rien à envier aux sacrifices atroces commis au nom des dieux mayas...

J'ai récemment reçu mes exemplaires de traducteur de ce thriller qui m'a occupée pendant toutes mes dernières non-vacances de Noël. C'est le troisième tome des aventures de l'agent Caitlyn Tierney, mais avec une histoire indépendante, de sorte qu'on peut très bien l'apprécier sans avoir lu les deux précédents. Je vous propose d'en gagner un en répondant dans les commentaires à la question suivante: quel est le thriller le plus passionnant que vous ayez jamais lu, celui qui vous a le mieux tenu en haleine jusqu'au bout? Clôture du concours jeudi 16 à minuit, et publication des résultats le lendemain. Envoi du livre en Europe seulement. Bonne chance à tous!

mercredi 8 juin 2016

"A madness of angels" (Kate Griffin)


Matthew Swift, sorcier de son état, se réveille nu et contusionné sur le plancher de sa chambre. Problème: il était mort depuis deux ans, et sa maison est désormais occupée par d'autres gens. Il fuit en pleine nuit dans les rues de Londres, où il est attaqué par une monstrueuse créature faite de détritus. Qui souhaite se débarrasser de lui cette fois? Et surtout: qui l'a ressuscité, et pourquoi? Dans sa quête de réponses, Matthew rencontre un groupe d'opposants à la Tour, une organisation magique qui connaît une montée en puissance inquiétante. Leur but: éliminer Robert James Bakker, le chef de la Tour. Or, Matthew connaît extrêmement bien cet homme... 

Il était une fois une jeune fille du nom de Catherine Webb, qui publia son premier roman jeunesse à l'âge de quatorze ans. Quand, une décennie plus tard, elle décida de passer à l'urban fantasy, elle prit le pseudonyme de Kate Griffin sous lequel elle écrivit quatre aventures de Matthew Swift. Plus tard encore, elle produisit un chef-d'oeuvre intitulé "Les quinze premières vies d'Harry August" qu'elle signa Claire North. Et voilà comment, traductrice de Claire North, j'en suis venue à m'intéresser à la série de Kate Griffin. 

J'avoue avoir eu du mal à rentrer dans "A madness of angels": le prélude, qui dure une centaine de pages, m'a paru un peu poussif en raison de longues, très longues descriptions. Mais une fois dans le vif du sujet, quand Matthew cesse de subir et commence à prendre des initiatives, je suis tombée sous le charme de ce Londres à la fois glauque et ultra-vivant, qui m'a souvent rappelé l'atmosphère de "Neverwhere" de Neil Gaiman. J'ai aimé le fonctionnement de la magie de Matthew, si intimement liée aux énergies spécifiques de la ville et presque inopérante en campagne. Pour le reste, il s'agit d'une histoire de vengeance bien ficelée, mais à la structure assez classique et au déroulement sans grande surprise. Je trouve que l'auteure s'écoute vraiment écrire, et que "A madness of angels" aurait été plus rythmé et plus agréable à lire si son éditeur lui avait fait couper un bon quart des 600 pages qu'il compte. 

"I rode up to the 24th floor. The lift was clear glass, on the outer wall of the building, so I could see the city drop away beneath me. As on the London Eye that night, I was astounded by the beauty of its multicoloured spectrum: not juste the sodium orange of the suburban sprawl, but the white interiors of office blocks, green traffic lights, red aircraft beacons on the taller towers, purple floodlights washing over high walls, pooling beams of silver on enclosed courtyards, shimmering blues on fountains, or in the doors of clubs, the moving snakes of traffic, defined only by headlights, brakes, or indicators flashing on and off like an endless slithering column of eyes, and the reflected pinkish glare across the ceiling of the sky, except for where an aircraft's guiding lights sent out a cone of brightness, through the black scudding clouds heavy with rain as the wind carries them towards the sea. 
I could almost drink the magic of what I saw, almost lie back suspended on nothing but its intensity and float above the ground with the force of it, the sudden, overwhelming sense of it - and that, we knew, was all sorcery was; all, perhaps, that we were. An awareness, an understanding, a point of view. Take away that sense of the city's wonder and we were no more than insects, grey figures on a grey landscape scuttling along, unable to see the daily extraordinary things."

lundi 6 juin 2016

"Aimer trois fois par jour" (Fausto Brizzi)


Bien que divorcé de la mère de ses deux enfants, Diego Anastasi, avocat en droit civil réputé, mène une vie plutôt agréable jusqu'au moment où une bonne grosse dépression lui tombe dessus sans crier gare. Son entourage restant sourd à ses plaintes, et ne parvenant pas à s'en sortir seul, il va voir un psy qui finit par le mettre sous traitement médicamenteux - sans grand résultat. Puis un jour, il pousse la porte du Brin de Causette, "magasin à bavardages" tenu par un retraité de la police. Très vite, Massimiliano le convainc que si ses proches n'ont rien fait pour lui, c'est aussi parce que lui n'a jamais rien fait pour eux. Diego se met donc à échafauder des plans pour rendre heureux les dix personnes qui lui sont les plus proches...

Je vous le dis tout de suite: si comme moi, vous avez adoré "Les beignets d'Oscar", premier roman de Fausto Brizzi, ne vous jetez pas sur le second en pensant qu'il vous plaira forcément. Bien que l'on retrouve certains protagonistes (Massimiliano le marchand de bavardages, mais aussi Umberto le meilleur ami de Lucio, désormais mort depuis deux ans, et la famille de ce dernier), l'élan vital et l'émotion qui faisaient tout l'intérêt des "Beignets d'Oscar" sont ici totalement absents. Dans la première partie, l'auteur se contente de débiter sentencieusement sur la dépression des platitudes qu'on jurerait tout droit sorties de Wikipédia. Dans la seconde moitié, son héros recourt à des méthodes toutes plus manipulatrices et débiles les unes que les autres pour tenter de faire le bonheur de ses proches malgré eux.

Le rapport avec le titre? On l'attend en vain. La tendance de l'auteur au bon gros machisme qui tache, déjà repérée dans "Les beignets d'Oscar"? Elle est plus présente que jamais, avec un père qui paie une prostituée pour dépuceler son fils, puis émet des jugements méprisants sur les travailleuses du sexe, ou une meilleure amie qui déclare que draguées par un homme beau mais con, la plupart des femmes commencent par dire non pour le principe mais finissent toutes par céder quand même. Quant à la fin, qui prône l'amûûûr comme remède ultime à la dépression... Pitié. Ne commettez pas la même erreur que moi, et gardez vos 20€ pour quelque chose qui les mérite davantage que cette sombre bouse.

samedi 4 juin 2016

Les sorties bédé que j'attends avec impatience en juin




J'avais adoré le premier tome de cette série de Zidrou, scénariste remarquable par l'humanité qui imprègne toutes ses histoires. Ici, il est question d'une famille de Belges moyens qui, chaque été, descendent dans le Sud de la France pour y passer leurs vacances. Pour le tome 2, on remonte deux ans en arrière, avant que le couple formé par le papa dessinateur de bédé et la maman vendeuse de chaussures n'arrive au bord du divorce...



A travers les aventures de Noa, créature synthétique à la plastique enviable, cette série de SF dystopique explore les thèmes du fanatisme religieux, de l'ultra-capitalisme et de la dictature des médias. Cinq ans se sont écoulés depuis la parution du T3, et j'avoue ne plus très bien me souvenir de l'histoire, mais j'y jetterai sans doute un coup d'oeil rien que pour la beauté des dessins.



Ca fait des années que je n'ai rien lu de Jean-Philippe Peyraud, dont la fausse légèreté et le trait épuré avaient enchanté mon début de vingtaine. Ici, il livre une "rafraîchissante comédie romantique et burlesque à la française qui mélange polar, amour, famille et remise en question". Vais-je résister? C'est peu probable - à condition qu'il sorte dans un format autre que numérique.