mardi 29 juin 2010

"Unseen academicals"


"Unseen Academicals" est le 37ème de la série des Annales du Disque-Monde, de Terry Pratchett. Non, je n'ai pas fait de faute de frappe. 37 romans de 500 pages environ situés dans le même univers, ça paraît incroyable, non? Presque autant qu'un auteur qui continue à écrire un à deux livres par an alors qu'il est atteint de la maladie d'Alzheimer...

Alors bien sûr, je trouve que la qualité de la série a quelque peu décliné au fil du temps. Le dernier tome qui a failli me faire mourir de rire était sans doute le 20ème, "Hogfather", dans lequel la Mort se voyait contrainte de jouer le rôle du Père Noël. Depuis, je n'ai pas toujours apprécié les sujets de satire choisis par Pratchett. "Going postal" ou "Money", par exemple, m'ont laissée assez froide. "Unseen Academicals", qui raconte comment les magiciens de l'Université Invisible montent une équipe de football pour disputer un championnat - un thème d'actualité, même en l'absence de vuvuzelas dans le livre - ne restera pas non plus parmi mes préférés.

N'empêche que le style très reconnaissable de l'auteur est toujours agréable à lire, et que même quand je ne me bidonne pas, je trouve toujours de nombreuses occasions de sourire ou de secouer la tête en me disant: "Bien vu". Pratchett est décidément le roi du jeu de mots; Patrick Couton, son traducteur français, n'a pas volé les nombreuses récompenses qu'il a raflées pour son travail. Et c'est un plaisir de retrouver d'une fois sur l'autre les personnages hauts en couleur auxquels je suis le plus attachée, y compris lorsqu'ils ne jouent qu'un rôle secondaire. Chaque apparition du seigneur Vetinari, de la Mort ou de Mémé Ciredutemps me remplit d'une intense jubilation. Pour le plaisir de me replonger chaque fois dans l'univers loufoque et étrangement cohérent du Disque-Monde, je continuerai à lire les Annales jusqu'au dernier tome.

mardi 22 juin 2010

"Finger lickin' fifteen"


Je me souviens très bien de l'époque où j'ai découvert la série des Stephanie Plum. J'ai dévoré les six qui étaient déjà sortis en poche et, n'y tenant plus, le septième qui n'était encore disponible qu'en grand format en l'espace de quinze jours (délais de livraison Amazon compris.) C'était l'été 2001 et tous les soirs, je me fourrais sous les draps du grand lit que je venais juste d'acheter et de monter moi-même après plus de trois ans passés à dormir dans un clic-clac. J'habitais dans un vieil immeuble aux murs assez épais pour maintenir la chaleur méridionale à distance, mais même à travers ma porte-fenêtre fermée, j'entendais les voitures qui passaient dans l'avenue deux étages plus bas. Je les entendais et je m'en fichais: j'étais trop occupée à me tordre de rire en lisant les invraisemblables (més)aventures de cette chasseuse de primes aussi peu douée que poissarde.

Après ça, j'ai dû attendre un an que paraisse chaque nouveau tome de la série. Et au fil du temps, la qualité de celle-ci n'a cessé de décliner. Les méchants barges et brillants du début sont devenus juste cons; les personnages secondaires excentriques et savoureux ont progressivement viré à la caricature; et les intrigues policières se sont réduites à une peau de chagrin tandis que l'héroïne continuait à hésiter entre les deux hommes de sa vie aux répliques et aux réactions archi-prévisibles. Mais je crois qu'avec le tome 15, on touche définitivement le fond.

C'est comme si Janet Evanovich générait désormais ses bouquins à partir d'une check-list établie par ordinateur. A priori, "Finger Lickin' Fifteen" comporte tous les éléments qui ont fait le succès de la série. Stephanie y détruit le nombre règlementaire de bagnoles et se retrouve successivement couverte de peinture rouge, de sauce barbecue et de farine. Mémé Mazur défouraille à la moindre occasion; Lula continue à s'empiffrer et à porter des fringues improbables; Maman Plum se signe en se demandant ce qu'elle a fait au ciel pour avoir une fille pareille et Papa Plum se réfugie dans la contemplation de son assiette en marmonnant des trucs incompréhensibles; Morelli ou Ranger sont toujours là pour sortir Stephanie du pétrin et lui promettre une nuit torride. Oui, il y a tout dans ce tome 15, sauf peut-être ce qui fait un bon bouquin: une âme. Je me suis ennuyée ferme pendant 370 pages. Une fois de plus, l'incapacité d'un auteur à s'arrêter à temps est en train de gâcher ce qui était à la base une excellente série.

(...dit-elle avant d'attaquer "Unseen academicals", le 37ème tome des Annales du Disque-Monde de Terry Pratchett.)

jeudi 10 juin 2010

"Invisible"


Il paraît qu'il faut écrire sur ce que l'on connaît. Si je ne suis pas nécessairement d'accord avec ce principe, Paul Auster, lui, s'emploie à n'y pas déroger depuis plus de vingt ans. De la même façon que Woody Allen, fut un temps, ne parlait dans ses films que d'intellos juifs new-yorkais, Paul Auster centre chacun de ses romans autour d'écrivains ou autres gens de lettres. Son oeuvre est une gigantesque mise en abyme de la littérature, un objet qui s'interroge sur et s'observe lui-même - mais avec une écriture si fluide, une structure si brillante qu'elle devient rarement absconse ou indigeste. C'est pourquoi j'attends toujours beaucoup de ses livres. Et c'est pourquoi j'ai été déçue par "Invisible", son dernier opus en date.

Je suis quelqu'un qui, d'ordinaire, s'attache aux personnages davantage qu'aux histoires. Ici, entre un jeune héros incestueux et vaguement pitoyable, son antagoniste charismatique mais monstrueusement immoral et une femme fatale presque dénuée de substance, il m'a été impossible de le faire. Restait ce que la quatrième de couverture promettait comme "le vertigineux kaléïdoscope (qui) met en perspective changeante les séductions multiformes d'un récit dont le motif central ne cesse de se déplacer". Comprendre: quatre parties toutes écrites d'un point de vue différent, et censées s'emboîter les unes dans les autres telles les pièces d'un puzzle. Sauf qu'arrivé à la dernière page d'"Invisible", le lecteur reste sur sa faim, avec trop de questions en suspens pour se sentir satisfait. Les personnages de Paul Auster ont toujours conservé une certaine part de mystère; ici, l'absence de certitudes à leur sujet ne les rend pas tant insaisissables qu'incohérents. Adam Walker a-t-il oui ou non eu une liaison avec sa propre soeur? Qu'est-ce qui a poussé Rudolph Born à l'approcher lors de cette soirée new-yorkaise, puis à lui proposer de créer un magazine littéraire? Nous ne le saurons jamais, et du coup, "Invisible" nous laisse un goût d'inachevé, d'inabouti.

lundi 7 juin 2010

"Troupes secrètes de combat Momoider"


Un manga avec une couverture si... rose ne pouvait manquer d'attirer mon attention et d'éveiller ma curiosité. Une fois que je l'ai pris en mains pour le feuilleter et que j'ai découvert l'existence d'une jaquette en plastique transparent qui s'enlevait pour révéler l'héroïne en petite tenue dessous, j'étais foutue foutue foutue, obligée d'acheter "Troupes secrètes de combat Momoider" sans jamais en avoir entendu parler et sans aucune garantie que ça ne soit pas une sombre bouse.

Momo Sakura, 22 ans, mensurations de rêve et cervelle de moineau, fait partie du commando secret des Momoiders, cinq filles chargées de protéger le Japon contre le général Râ et son armée de monstres modifiés. Le problème, c'est que Momo n'a pas son permis et qu'elle arrive régulièrement sur les lieux de l'intervention une fois la bataille terminée. Ben oui, on ne circule pas vite en trottinette électrique dans les rues de Tokyo! Et le jour où ses problèmes de transport sont enfin résolus, de sévères restrictions budgétaires obligent Momo et ses collègues à devenir hôtesses déguisées dans un bar fréquenté par le gratin de l'armée japonaise...

On l'aura compris, "Momoider" n'est absolument pas un manga sérieux, mais une parodie de "Kamen Rider" et autres séries mettant en scène des groupes de super-héros en costumes multicolores. Parodie complètement délirante et très, très réussie à mon humble avis. J'ai ri aux éclats en lisant ce sympathique one-shot, alors que je ne suis même pas fan du genre dont il s'inspire - et toute personne qui a vu dans sa vie ne serait-ce qu'un épisode des "Power Rangers" ou de "Bioman" devrait en faire autant.

samedi 5 juin 2010

"Woo-Lee et moi"


Les éditeurs français commencent à proposer de plus en plus de mangas autre que japonais, et il faut les en féliciter, car l'empire du soleil levant n'est pas le seul à produire une bande dessinée digne d'intérêt en Asie.

Je vous avais déjà parlé de l'étonnant "Kylooe", oeuvre d'une jeune auteure chinoise. Cette semaine, à l'occasion d'un passage chez Brüsel, j'ai jeté mon dévolu sur "Woo-lee et moi" de la Coréenne Sim Heung-Ah. Ce one-shot qu'on devine assez autobiographique a pour narratrice l'aînée de deux jumelles dont la mère a fait ses valises peu après leur naissance, et qui habitent dans un temple avec leur père chauffeur de bus. L'argent manque souvent. L'attention d'une mère aussi.

Comment grandir au sein d'une famille atypique dans une société archi-conformiste où la cellule familiale traditionnelle est la base de tout? Comment trouver sa place et son identité à côté d'une soeur plus volontaire et plus féminine, alors qu'on n'a aucun modèle maternel auquel se référer? Le sujet est traité avec une pudeur toute asiatique, souvent dans le non-dit. Il faut savoir déchiffrer les silences et les gestes des personnages, se laisser émouvoir par leur retenue. Moyennant quoi, on trouvera que "Woo-Lee et moi" se termine beaucoup trop vite.