vendredi 26 octobre 2018

"La marelle" (Samantha Bailly)


Sarah va bientôt avoir trente ans. Tout lui réussit : un poste prestigieux dans l’univers prisé de la mode, une bande d’amis qui brûle la chandelle par les deux bouts, une vie de couple épanouie. C’est alors qu’un soir, elle tombe sur un livre : Marelle, de Julio Cortázar. Cette trouvaille est un séisme. Ce livre n’est pas n’importe lequel : les pages sont annotées de sa main et de celle d’un homme qu’elle a aimé bien des années plus tôt. Le passé ressurgit sans crier gare, et avec lui, les fantômes d’une passion aussi intense qu’insensée. Elle et lui avaient décidé de jouer à un jeu. Le jeu d’une passion véritable, sans se révéler leurs identités, un jeu qui devait rester en périphérie de leurs existences, ne jamais s’inviter dans la réalité. Bouleversée par ce livre qu’elle est incapable d’oublier, dernière trace de cette passion enfouie, Sarah va se lancer dans une enquête éperdue pour retrouver celui dont elle ignore tout, sinon que de l’aimer l’a marquée d’une brûlure indélébile.

Il existe bien des critères susceptibles de me pousser à acheter un livre. Dans ce cas précis, c'était un peu particulier. L'autrice, Samantha Bailly, a beaucoup fait parler d'elle ces derniers mois en devenant en France une des militantes les plus actives pour le droit des auteurs, et en participant à fonder d'abord une Charte des auteurs jeunesse, puis une Ligue des auteurs professionnels dont elle est devenue présidente dans les deux cas. Elle bataille avec énormément de pugnacité et sait utiliser les réseaux sociaux de manière intelligente. Tout récemment, elle a fait de nouvelles vagues en annonçant que son prochain roman (malgré son jeune âge, elle en a déjà publié une vingtaine chez différents éditeurs "classiques") paraîtrait dans un premier temps uniquement en numérique et en auto-édition. Couplé à l'allusion au roman de Cortázar, qui attend dans ma PAL depuis des années, cela a suffi à me rendre assez curieuse pour acheter "La marelle" dès le jour de sa sortie. 

Passons maintenant au livre proprement dit. Et commençons par la partie qui fâche: je n'aime pas le style de Samantha Bailly. Beaucoup trop d'adjectifs. Des dialogues qui ne sonnent pas naturels. Une écriture que je qualifierais globalement d'un peu précieuse, alors que j'aime les plumes fluides et plus spontanées. Et malgré cette réserve, j'ai été happée par l'originalité de son histoire. Au travers d'interrogations amoureuses plutôt classiques au premier abord (la passion avec un homme mystérieux et fantasque, ou un couple stable avec un type solide et peu démonstratif?), son héroïne  est avant tout à la recherche d'elle-même. Incarnation de la Parisienne moderne, professionnellement accomplie et toujours en train de s'étourdir de sorties, Sarah dissimule des interrogations profondes et une quête d'authenticité qu'elle ne sait pas par quel bout prendre. Ses hésitations, ses doutes, ses volte-face sonnent très juste. Et j'ai beaucoup apprécié que la résolution du triangle amoureux ne soit pas celle qu'on aurait pu voir venir à des kilomètres, que la conclusion soit axée sur Sarah en tant que personne et non en tant que moitié d'un couple.

J'étais par ailleurs curieuse de voir à quel point l'absence d'intervention d'un éditeur professionnel se sentirait dans le bouquin. Si je suis souvent en bisbille avec les maisons d'édition pour les conditions de travail qu'elles nous imposent, j'ai toujours pensé que, sauf auteur très chevronné et doté d'un excellent recul sur son propre texte, le travail d'édition était indispensable à l'obtention d'un ouvrage de qualité. Je ne sais pas par qui ni comment Samantha Bailly s'est fait relire et corriger sur "La marelle", mais au final, je n'ai pas relevé plus de problèmes que dans un roman publié de manière classique (quelque soin qu'on apporte à cette étape, il reste toujours quelques broutilles par ci par là dans la version qui atterrit en librairie). En ce qui me concerne et bien que je ne raffole pas de son style, c'est donc un essai joliment transformé.

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