Diagnostiquée Asperger dans sa petite enfance, Yasmine Murphy présente aussi le syndrome du savant, et elle est synesthète par-dessus le marché. Sa vision du monde ne ressemble à aucune autre - et elle s'apprête à la partager avec les neurotypiques en se laissant filmer pendant qu'elle prépare ses examens de fin de lycée.
Lila est la soeur de Yasmine. Rongée par un eczéma chronique qu'elle se donne un mal fou pour dissimuler, elle vit dans un taudis et enchaîne les conquêtes amoureuses autant que les petits boulots. C'est une artiste douée mais en colère, persuadée que Yasmine fait du cinéma depuis toujours et qu'elle lui a volé toute l'attention maternelle.
Asif est l'aîné de la fratrie, l'éternel gentil garçon invisible aux yeux de tous. A la mort de leur mère, il a abandonné des études prometteuses pour prendre soin de Yasmine. Depuis, il fait un travail de bureau sans intérêt et a tiré une croix sur toute vie sociale.
Le tournage du documentaire consacré à Yasmine va bouleverser leur équilibre bancal, obligeant chacun d'eux à repenser sa vision de la vie et de son propre avenir.
Je ne saurais dire si la voix très particulière de Yasmine est réaliste par rapport à sa forme d'autisme, mais elle m'a complètement fascinée - sans doute parce que je suis également synesthète, même si beaucoup moins qu'elle, et que je partage pas mal de ses névroses à un certain degré. J'ai trouvé passionnant de voir comment son neuroatypisme affectait les autres membres de sa famille, les forçant à adopter des rôles dont ils ne voulaient pas. Roopa Farooki montre bien de quelle façon le handicap d'un enfant concentre toute l'attention sur lui au détriment de ses frères et soeurs, créant des situations injustes et frustrantes qui ne sont la faute de personne et auxquelles personne ne peut remédier vraiment. Pour autant, "Les choses comme je les vois" n'est pas une lecture déprimante, puisque tous ses protagonistes finissent par trouver leur place - un compromis entre devoirs et choix personnels - ainsi qu'une certaine forme d'apaisement. Un beau roman humain et intelligent, qui s'efforce de comprendre sans jamais juger.
"Si je m'organise soigneusement, je peux essayer de faire en même temps une dernière chose sur ma liste qui est la seule qui ne concerne pas une expérience sensorielle: je pourrais sauver une vie. En fait, je pourrais peut-être même en sauver plusieurs si je me débrouille pour mettre un terme à ma vie d'une manière qui permette à mes organes d'être prélevés pour des greffes. C'est logique: on pourrait sauver plein de vies si on organisait de temps à autre une loterie dans laquelle une personne mourante donnerait ses organes à tous les autres avant que la maladie qui est en train de la tuer ne les abîme, mais je suppose que la famille s'y opposerait. Cette idée ne me dérange pas, mais je suis réaliste quant au fait que je suis en train de mourir. Comme tout le monde. C'est juste une question de temps. Et aucune personne n'est plus importante qu'une autre, pas plus qu'un grain de sable dans l'océan."
Il y a quelques éléments qui m’intriguent et m’intéressent (étant « un peu » synesthète aussi) mais je crains de ne pas me laisser emporter par l’intrigue globale et l’extrait ne me convainc pas spécialement. Malgré tout, je note le nom de cette auteur, sait-on jamais ^^
RépondreSupprimerPS : et puis la majuscule à « Choses » m’interpelle...
La majuscule à Choses, c'est juste une règle typographique que peu d'éditeurs respectent encore, et qui veut que le premier nom dans un titre prenne une majuscule même si ce n'est pas le premier mot. Je trouve ça moche et illogique, mais bon.
RépondreSupprimerAh oui ? Merci pour l’explication.
RépondreSupprimerC’est moche et incohérent (alors qu’en anglais, ça me semble mieux).
Je découvre la signification du terme "synesthète" et je suis subjuguée, je n'avais jamais entendu parler de ce "trait de personnalité" !
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