jeudi 29 septembre 2016

"Les deux pigeons" (Alexandre Postel)


Comme les pigeons de la fable, Théodore et Dorothée s'aiment d'amour tendre. Cela ne les empêche pas de s'interroger: comment se divertir? Se nourrir? Que faire de ces deux corps? A quoi se consacrer? Faut-il fonder une famille, travailler, s'indigner? Comment font les autres? Autant de questions qui surgissent au fil de cette odyssée des manières de vivre. 

Lui-même trentenaire, l'auteur passe au crible les questions existentielles qui taraudent sa génération - ou du moins, la frange blanche éduquée appartenant à la classe moyenne supérieure de sa génération. Ce portrait, pourtant réalisé sans méchanceté et même avec une certaine tendresse, fait un peu froid dans le dos quand on réalise la vacuité aspirationnelle (j'invente des expressions si je veux) que l'on partage avec les héros: pleins de bonne volonté, soucieux de bien faire, mais aussi nombrilistes, velléitaires et un peu lâches. On finit par mépriser chez eux ce dont on a vaguement honte chez nous. Ou bien, c'est juste moi. Héritier spirituel du roman de Georges Pérec "Les choses" qui dénonçait le consumérisme dans les années 60, "Les deux pigeons" m'a mise mal à l'aise de la meilleure des façons.

"Ils renièrent les plats surgelés, se préoccupèrent de leur santé. Ils apprirent que l'aspartame provoque des naissances prématurées, que la charcuterie favorise le cancer du rube digestif, les laitages le cancer de la prostate, les sodas le cancer du pancréas. Toutes les céréales raffinées sont cancérigènes. Le fructose rend diabétique. Les carottes réduisent les risques de cancer colorectal, mais les aggravent chez les fumeurs. Le soja protège le sein tout en menaçant l'utérus. Seuls les oméga-3 sont salubres, mais attention! Le saumon d'élevage est gavé d'insecticides."

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire