mercredi 7 décembre 2011

"Le voyage de cent pas"



"Mon nom est Hassan Haji. Deuxième d'une famille de six enfants, je suis né au-dessus du restaurant de mon grand-père situé Napean Sea Road dans Bombay Ouest, bien avant que cette métropole ne soit rebaptisée Mumbai. J'ai tendance à penser que mon destin était scellé d'avance, car mon premier éveil à la vie fut l'odeur du machli ka salan, le curry de poisson épicé, qui montait à travers les lattes du plancher jusqu'à mon berceau (...). Aujourd'hui encore, je me souviens de la sensation des barreaux de mon lit pressés contre mon visage de bébé tandis que, le nez levé, je humais ce paquet aromatique de cardamome, de têtes de poissons et d'huile de palme qui m'invitait déjà, en dépit de mon jeune âge, à découvrir et à savourer les richesses incommensurables du monde extérieur."

Ainsi commence "Le Voyage de Cent pas", premier roman de Richard C. Morais dont l'adaptation cinématographique est déjà en cours. Et contrairement à ce que son titre prête à croire, ce sont des milliers de kilomètres que Hassan Haji va parcourir avant de devenir un grand chef cuisinier. Son enfance à Mumbai, à la frontière entre le bidonville et le quartier riche, s'achèvera par une tragédie qui décidera son père à immigrer en Angleterre. Après quelques années à Londres, le destin conduira toute la famille à s'installer dans le petit village de Lumière, au milieu des montagnes du Jura. Là, le père d'Hassan tentera de monter un restaurant indien et se heurtera à l'implacable inimitié de sa voisine Gertrude Mallory, une fervente défenderesse de la tradition culinaire française...

Le voyage et la cuisine étant deux de mes thèmes favoris en littérature, je ne pouvais manquer d'apprécier les savoureuses aventures d'Hassan Haji. C'est vrai que l'histoire est plus intéressante que son héros, un peu transparent à mon goût. C'est vrai aussi que le grand bond en avant entre le moment où il quitte Lumière simple apprenti cuisinier et le moment où on le retrouve à Paris, propriétaire de son restaurant et titulaire de deux étoiles décernées par le Guide Michelin, résume très rapidement un pan de sa vie qu'il m'aurait paru intéressant de détailler. Au lieu de quoi, on a droit à une critique des guides gastronomiques et du système fiscal français qui tombe un peu comme un cheveu sur une soupe jusque là délicieusement parfumée. Malgré ces quelques réserves, "Le voyage de cent pas" reste un roman à dévorer avec gourmandise.

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