vendredi 8 juillet 2005

"Un amour de jeunesse"


Carrie a 23 ans. Elle a toujours habité dans la même petite ville, connaît sa meilleure amie depuis le jardin d'enfants et doit épouser le garçon avec qui elle sort depuis près de dix ans. Et déjà, elle commence à regimber contre ce destin tout tracé...

"Pendant longtemps, j'avais considéré Mike comme nécessaire, j'avais vu en lui le ballast qui me protègerait. A présent, ce ballast me maintenait à ras de terre, me retenait: or j'avais envie de légèreté, de liberté. Je fondis en larmes et il bondit du canapé pour me prendre dans ses bras et, je détestais ça aussi, la facilité du geste, ce faux réconfort. Je ne supportais pas de voir les semaines, les années se déployer avec autant de clarté."

...Lorsqu'à la suite d'un accident, son fiancé devient tétraplégique. Incapable de faire ce que son entourage attend d'elle, Carrie s'enfuit à New York où elle commence une autre vie et noue une liaison avec le mystérieux Kilroy. Elle est en train de devenir une autre personne lorsque survient une nouvelle tragédie qui semble réclamer sa présence à Madison.

"Dans 24 heures, je serais là-bas, couchée dans mon vieux lit au premier étage de chez ma mère. Je serais rentrée de l'aéroport avec elle en empruntant des rues dont je savais déjà que je les trouverais dégagées et d'un calme sinistre. (...) New York me serait devenu un rêve, à peine tangible face à toutes ces choses que je connaissais si bien. Or ce que je voulais, c'était que Madison devienne le rêve et cette chambre, cette soirée, la réalité durable."

Que doit-on à nos proches? Faut-il sacrifier ses propres désirs au nom de l'amour? Vaut-il mieux faire du bien pour de mauvaises raisons (la culpabilité) que du mal pour de bonnes raisons (accomplir son propre destin)? Et jusqu'à quel point notre identité dépend-elle de ce et ceux qui nous entourent? Telle sont les questions qu'Ann Packer pose avec énormément de finesse dans "Un amour de jeunesse".

"A midi, je l'emmenai faire la connaissance de Mike. Ne sachant pas trop lequel des deux allait impressionner l'autre, je me sentais mal à l'aise, mais le problème ne se situait pas là: je me sentais mal parce que je n'étais pas sûre de réussir à être une seule et même personne face à eux deux."

Ce roman est merveilleusement bien écrit - et pas trop mal traduit pour une fois. Il regorge de détails qui sollicitent les cinq sens et transportent instantanément le lecteur dans les décors où évolue son héroïne. Et surtout, je me suis beaucoup retrouvée dans les interrogations de Carrie - même si je ne suis pas certaine que j'aurais fait le même choix à la fin.

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