lundi 20 juin 2016

"Les petites consolations" (Eddie Joyce)


Descendant d'immigrés italiens du côté de son père et irlandais du côté de sa mère, Bobby Amendola, pompier, a perdu la vie dans les attentats du 11 septembre 2011. Il laissait derrière lui des parents dont il était le chouchou, deux frères aînés aux caractères très différents et une épouse enceinte de leur second enfant. Dix ans plus tard, sa femme Tina annonce qu'elle a retrouvé l'amour et souhaite présenter son nouveau compagnon aux Amendola à l'occasion de l'anniversaire de leur fils, Bobby Jr. Gail, la matriarche, ne le vit pas bien du tout et tente de préparer les autres membres du clan à cette rencontre...

Durant une semaine, nous suivons chacun des Amendola tandis qu'ils évoquent leurs souvenirs et procèdent à un état des lieux de leur vie présente, souvent très influencée par le décès de Bobby. Tina, la seule et unique petite amie que Bobby ait jamais eue, culpabilise à l'idée de refaire sa vie malgré le temps écoulé. Peter le fils aîné, brillant avocat dans un cabinet de Manhattan, se débat contre les conséquences catastrophiques de sa liaison avec une jeune collègue. Franky le cadet est devenu une épave rongée par l'alcool, qui passe ses journées à boire et à faire des paris sportifs. Michael le père rumine ses regrets: sa vie aurait-elle été différente s'il avait repris la boucherie familiale au lieu de se rebeller contre son destin tout tracé? Hantée par le souvenir du défunt, Gail repense aux erreurs commises dans l'éducation de ses enfants, aux difficultés qu'elle a surmontées dans son couple.

De la même façon que chacun d'eux gère différemment son deuil, chacun d'eux a un rapport très personnel à ses origines. Pour Gail et Michael, enfants d'immigrés de la première génération, cela se caractérise par une opposition têtue à l'exemple donné par leurs parents. Pour leurs fils, c'est soit un attachement très marqué à Staten Island où ils ont grandi, soit un rejet viscéral de ce que les autres New-Yorkais considèrent comme un quartier de bouseux. Eddie Joyce met à nu les rouages internes de chaque membre de la famille Amendola, sans excuser leurs travers mais sans les juger non plus. Il en résulte un roman qui se dévore d'un trait, et dont la fin émotionnellement brillante m'a mis les larmes aux yeux.

"Il sait que c'est une mauvaise idée, se tourmenter l'esprit en imaginant les routes que sa vie aurait pu suivre. Il sait aussi qu'Internet n'est qu'un reflet lisse et schématique, caricatural, de la vérité humaine, qu'à cause de l'épreuve qu'il traverse ses propres illusions déposent un vernis idéalisé sur les parcours alternatifs." 

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