vendredi 22 janvier 2016

"Une odeur de gingembre" (Oswald Wynd)


En 1903, Mary Mackenzie embarque pour la Chine où elle doit épouser Richard Collingsworth, l'attaché militaire britannique auquel elle a été promise. Fascinée par la vie de Pékin au lendemain de la Révolte des Boxers, Mary affiche une curiosité d'esprit rapidement désapprouvée par la communauté des Européens. Une liaison avec un officier japonais dont elle attend un enfant la mettra définitivement au ban de la société. Rejetée par son mari, Mary fuira au Japon dans des conditions dramatiques...

"Une odeur de gingembre" est le roman qui fut le plus souvent offert lors des swaps littéraires et rondes de poches que j'organisais à une époque, et j'avoue que ça m'intriguait. Du coup, même si je ne suis pas très fan de romans historiques, quand je l'ai trouvé chez Pêle-Mêle en état neuf, je me suis dit que je ne risquais pas grand-chose à essayer de le lire. Il avait deux atouts pour me séduire: sa forme de journal intime mâtiné de correspondance privée, et le fait qu'une bonne moitié de l'histoire se passe au Japon. Et de fait, je l'ai dévoré. 

J'ignore comment Oswald Wynd a pu aussi bien se projeter dans la tête d'une femme du siècle dernier, mais son héroïne est extrêmement crédible. Elle porte sur l'Asie du début du XXème siècle le regard d'une étrangère naïve qui découvre tout avec une belle ouverture d'esprit, un mélange de perplexité et d'amusement, mais surtout une grande volonté d'adaptation. Bien qu'elle soit à la base une jeune Ecossaise des plus ordinaires, dont le destin bascule à cause d'une seule impulsion, elle ne renonce jamais et réussit le tour de force de se construire une existence au Japon en tant que femme seule marquée du sceau de l'infamie. J'aurais pu continuer à lire son journal pendant des centaines de pages encore. 

J'avoue avoir été un peu frustrée par les "blancs" à certains moments-clés de sa vie, notamment lorsqu'elle devient mère pour la première fois ou qu'elle lance sa propre entreprise de confection. Ne parlons même pas des circonstances dans lesquelles se referme le roman: elles m'ont laissée tout à fait déconfite. Néanmoins, "Une odeur de gingembre" est vraiment un beau portrait de femme, doublé d'un regard intéressant sur la culture niponne et la vie au Japon dans la première moitié du XXème siècle.  Il m'a appris beaucoup de choses sur les guerres en Asie à cette époque sans me barber une seule seconde. 

"Il m'arrive parfois de penser à ces petits incidents qui semblent sans importance et qui ont changé le cours de ma vie, comme d'aller chez Margaret Blair et d'y avoir rencontré Richard, une chance sur dix mille, en réalité. Et puis il y a eu cette promenade matinale sur un sentier qui traversait un petit bosquet de bambous et menait à Kentaro. Que des événements aussi anodins puissent transformer aussi radicalement le cours de ma vie veut-il dire que je suis atteinte d'une espèce particulière de folie? Les autres bâtissent-ils leur vie sur de tels incidents? Je crois bien que ne réussissent dans la vie que les gens à qui il n'arrive rien, et qui planifient leurs jours comme la trajectoire d'un bateau sur une carte, sans jamais quitter leur boussole des yeux."

5 commentaires:

  1. Cécile de Brest22 janvier 2016 à 10:19

    Je l'ai lu il y a quelques années. Comme toi, j'avais été happée par l'histoire. On ne s'ennuit pas une seconde avec ce roman.
    Je suis toujours admirative de ces auteurs qui arrivent à se glisser si bien dans la tête des personnages. A tel point qu'on adhère totalement.

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  2. Quand j'ai terminé le livre, j'ai regretté qu'il n'y avait pas de suite et j'ai commencé à en imaginer une...

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  3. Je l'ai dans ma PAL, dans la jolie édition Petit Quai Voltaire, je suis impatiente de le commencer, mais là je suis absorbée par "La Passe-Miroir" ...

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  4. Ta chronique m'avait donné envie : je viens de le refermer et ça m'a enchanté !

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    1. Tous les gens que je connais qui l'ont lu l'ont adoré!

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