samedi 26 décembre 2015

"La passe-miroir T1: Les fiancés de l'hiver" (Christelle Dabos)


Sous son écharpe élimée et ses lunettes de myope, Ophélie cache des dons singuliers: elle peut lire le passé des objets et traverser les miroirs. Elle vit paisiblement sur l'arche d'Anima quand on la fiance à Thorn, du puissant clan des Dragons. La jeune fille doit quitter sa famille et le suivre à la Citacielle, capitale flottante du Pôle. A quelle fin a-t-elle été choisie? Pourquoi doit-elle dissimuler sa véritable identité? Sans le savoir, Ophélie devient le jouet d'un complot mortel

Ouah. 
OUAH. 
OUAAAAAAAAAAH. 
Pour un peu, j'en perdrais ma capacité à former des phrases cohérentes. 
Je ne comprends pas comment j'ai attendu si longtemps pour découvrir le premier tome de "La passe-miroir", lauréat du concours du premier roman jeunesse organisé en 2012-2013 par Gallimard. J'avais bien aperçu quelques critiques dans divers blogs de lecture, et Amazon me le recommandait avec insistance, mais j'ai fait une indigestion de fantasy il y a bien longtemps, et depuis, je suis devenue très, très sélective sur mes lectures en la matière. Au cours de la dernière décennie, seuls ont trouvé grâce à mes yeux la série des Kushiel de Jacqueline Carey et celle des Salauds-Gentilhommes de Scott Lynch. Alors, de la fantasy jeunesse écrite par une auteure française, ça ne m'attirait pas plus que ça a priori.

Et puis, par curiosité et parce que je ne cessais d'en entendre beaucoup de bien, je me suis plongée dans les 500 pages des "Fiancés de l'hiver". Et dès le premier chapitre, j'ai été complètement happée par l'univers riche et original de Christelle Dabos. La Terre, ronde autrefois, a volé en éclats pour donner naissance à différentes arches, mondes fragmentaires sur lesquels règnent des esprits de famille immortels. Les descendants humains de ces esprits sont dotés de pouvoirs qui diffèrent sur chaque arche, voire à l'intérieur de chaque clan. Ainsi, sur Anima, ce sont des animistes qui communiquent avec les objets et savent les faire se mouvoir par leurs propres moyens. Au Pôle, on trouve les Dragons capables de donner des coups de griffes mentaux, les Mirages qui sont des créateurs d'illusions ultra-réalistes, et bien d'autres encore qu'on ne découvre qu'au fil des chapitres.

Dans ce monde steampunkisant complexe évolue Ophélie, une héroïne très différente de celles qu'on trouve habituellement dans les romans de fantasy: maladroite en diable depuis un accident de miroir survenu alors qu'elle avait 13 ans, toujours vêtue de vieux habits élimés, de bottines dépareillées et d'une immense écharpe-golem qui se comporte comme un chat, si discrète qu'on l'entend à peine quand elle parle, pas romantique pour deux sous mais terriblement obstinée sous son apparente fadeur. Elle est entourée de personnages secondaires tout aussi bien campés: Thorn, son taciturne et mystérieux fiancé dont elle ne parvient pas à comprendre les motivations; la tante Berenilde, favorite d'entre les favorites, la beauté et le charme incarnés mais une redoutable manipulatrice; l'ambassadeur Archibald, déroutant de franchise et dont le passe-temps favori consiste à cocufier tous les époux de son entourage; Renard, le valet roux intéressé mais bon camarade; Gaëlle, la mécanicienne qui a de bonnes raisons de dissimuler un de ses yeux en permanence...

Outre cet univers passionnant et ces personnages formidables, "Les fiancés de l'hiver" possède deux énormes atouts. D'abord, une intrigue savamment tissée. Prise dans les manigances de la cour du Pôle, Ophélie ignore à qui elle peut se fier; les gens les plus attentionnés envers elle nourrissent souvent des intentions cachées, tandis que ceux dont elle se méfie au premier abord se révèlent des alliés potentiels - ou pas. Nul n'est tout noir ou tout blanc: chacun sert ses propres intérêts, et pour une étrangère au Pôle, il est très difficile d'en démêler les fils. Ensuite, Christelle Dabos écrit fichtrement bien, avec un style maîtrisé et plein de fantaisie qui fait jaillir les images sous les yeux du lecteur. Sa façon d'employer ça et là de vieux mots un peu désuets donne énormément de saveur à la narration. Bref, vous l'aurez compris, je suis totalement sous le charme de "La passe-miroir", qui ne m'a tenu trois jours que parce que je bossais en même temps et me forçais à me rationner. C'est certainement ma meilleure lecture de l'année, et une des meilleures lectures de fantasy de ma vie. Avant même de rédiger ce billet, je l'avais déjà fait acheter à trois personnes de mon entourage. Quant à moi, je dois patienter jusqu'à début janvier pour lire le tome 2 paru en novembre dernier. 

6 commentaires:

  1. Je l'ai déjà lu, tout comme le tome 2, j'ai adoré :)

    RépondreSupprimer
  2. Oooooooh ! *Ajoute fébrilement un titre à sa liste de livres-à-se-procurer*

    Mélusine

    RépondreSupprimer
  3. C'est tellement un bouquin pour toi que j'ai pensé à toi en lisant certaines réflexions d'Ophélie.

    RépondreSupprimer
  4. Aaaah, tu le lis donc seulement,j'aurais juré que c'était fait tant il est pile dans ce qui me semble te plaire ! Moi j'ai du attendre si longtemps pour que la suite arrive que je vais sans doute le relire pour me remettre en immersion dans ce monde et cette écriture magnifiques. Mais ce ne sera pas du tout un problème tellement ce livre m'a plu !

    RépondreSupprimer
  5. La marraine de ma fille était à la recherche d'une idée de livre comme cadeau, Suite à ta chronique élogieuse,je lui ai conseillé ce livre: Gros, gros succès chez nous pour elle et pour moi.Le tome 2 est également génial. Merci beaucoup !

    RépondreSupprimer
  6. Tu dois être la quatorzième ou quinzième personne qui l'a acheté/fait acheter sur ma recommandation, et jusqu'ici que des retours enthousiastes!

    RépondreSupprimer